Sous-titré « roman fiction », mais truffé d’épisodes manifestement autobiographiques, Gentil Chapon touche du bois est un livre fascinant, au statut hybride, une forme d’autofiction où l’auteur joue vertigineusement avec la folie. Le narrateur se défend d’être fou, mais met en scène ses symptômes, relate son internement, et surtout, dans certaines pages, tord la langue d’une manière si singulière qu’on pourrait soupçonner une inspiration psychotique.
Fou ou non, ou à quel point, la question reste indécidable : reste qu’un tel livre, tant par sa construction que ses qualités stylistiques, impose le talent d’écrivain de Schwarz-Abrys.
Gentil Chapon s’ouvre sur le récit d’un séjour à l’asile, puis plonge dans le passé du narrateur, dans un pays indéterminé, une enfance pauvre, troublée, violente, où s’annoncent des obsessions – superstitieuses, sexuelles – qui s’affirmeront tout au long de sa vie. Puis c’est l’arrivée en France, le début d’une carrière de peintre, la Seconde Guerre mondiale… Les signes d’agitation mentale s’intensifient, conduisant à l’internement. Gentil Chapon s’achève sur le choix de la psychanalyse comme voie thérapeutique, c’est aussi l’une des pistes possibles pour l’interprétation de cette œuvre si énigmatique.