« Ça m’a pris il y a quelques mois, j’ai commencé à écrire mes prières et mes vœux sur des bouts de papier. Et puis je suis allée les planter dans les pots de fleurs de la cathédrale, très discrètement. Même dans les pots de fausses fleurs, dans la mousse. Je plante mes prières dans les pots de fleurs devant les sculptures et puis je m’assieds. Je reste là à ne rien foutre un moment, et je me sens mieux. Il y a toujours le même gars qui prie la Vierge à côté de moi. Je peux y aller à n’importe quelle heure, il est là. Il ressemble à un violoncelliste polonais d’une autre époque, du cheveu et de la veste, je trouve. J’ai souvent envie de lui sourire, mais il a toujours les yeux fermés. Il prie les yeux fermés. Ça ne sert absolument à rien que je lui sourie s’il ne me voit pas, mais je me dis qu’il voit peut-être à travers ses paupières, alors je lui souris. Je me demande bien de quelle couleur sont ses yeux d’ailleurs. Azur, comme le ciel plombé d’aujourd’hui, peut-être. Comme les miens, couleur dépression. »