… les traîne-bruyères. C’est ainsi que l’on nomme celles qui ont bu le sirop des chemins et en ont pris le goût.
Quelque part entre l’Espagne, l’Algérie et la France, des femmes quittent leur foyer et s’exilent. Autant de trajectoires qui tracent ensemble les contours d’une histoire à trous. Mais à mesure que Charlotte Bonnefon recompose cette mémoire familiale parcellaire, d’autres existences viennent se superposer à son enquête. Ce sont celles des femmes – mères, filles et sœurs – de Hassi Messaoud, capitale algérienne de l’or noir. Un soir de juillet 2001, leurs vies basculent. Pourtant, face à la violence des hommes, des lèvres s’entrouvrent et bruissent, des mains silencieuses se touchent et se rassemblent. Toute une constellation d’images affleure alors à la manière d’un refrain aux reflets chatoyants : des plantes et des fleurs, un désert et ses puits de pétrole, des femmes qui tissent ensemble. En faisant peu à peu disparaître les frontières, Nos invisibles esquisse une généalogie, aussi douce que puissante, des corps, des âmes et des terres.